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«Plaidoirie pour des relations entre la France et l’Afrique apaisées, fondées sur le respect, la considération et les avantages mutuels», par Amadou Bal BA

«On n’attrape pas les mouches avec du vinaigre», dit bien un dicton de nos Ancêtres les Gaulois. Par conséquent, une diplomatie du conflit, du mépris, de l’arrogance, de l’irrespect, des barbouzes, comme au bon vieux temps de l’Empire colonial, au lieu de la négociation, est particulièrement contre-productive. Cette orientation belliqueuse est gravement préjudiciable aux intérêts français en Afrique. Ce qui se passe dans la conduite des relations internationales de la France, à l’égard de ses anciennes colonies, est d’une gravité exceptionnelle. Contre toute règle de la logique et de la rationalité la plus élémentaire, la Macronie fonce joyeusement dans le mur. Toute une presse, complaisante des forces du Chaos, pousse au crime, et met de l’huile sur le feu. Où va-t-on ?
Tout est fait, comme en politique intérieure, après la censure de Michel BARNIER et celle qui arrive pour François BAYROU, pour aller au désastre. La diaspora africaine est diabolisée, comme des Français de papiers, et la prétendue menace du grand remplacement, fait de cette diaspora, comme en 1940, des ennemis de l’intérieur, alors qu’ils peuvent être utiles, comme un pont entre la France et l’Afrique, pour renouer les fils du dialogue, qui n’aurait pas dû se rompre.

Par conséquent, je regrette qu’il n’y a aucune voix forte, une grande conscience morale, pour dire que la France des droits de l’Homme, des valeurs républicaines, méritait mieux que cela ; ce pays des Lumières a sa juste place en Afrique, à condition de tourner le dos aux va-t’en guerre, pour renouer les fils du dialogue et la diplomatie, avec l’Afrique. On se calme !

Charles de GAULLE, en dépit de la tragédie de la guerre d’Algérie, avait eu la grande clairvoyance de négocier les accords d’Évian, et cela au péril de sa vie. En effet, il a échappé, de justesse, à un attentat de l’Organisation de l’Armée Secrète, au Petit Clamart. Je crois que la crise algérienne nécessiterait de la médiation pour renouer les fils du dialogue. «Les Français doivent parler aux Africains», pour paraphraser radio Londres de Charles de GAULLE. En effet, la France, dans sa prétention universaliste, a vocation à parler à tous, aux Marocains, comme aux Algériens, à tous les Africains, sans opposer les uns aux autres. En particulier, les Algériens de France sont une importante communauté et le gaz algérien ça compte. Vouloir jouer, la mosquée de Paris les Marocains contre les Algériens, ou remettre en cause la convention franco-algérienne de 1968, c’est attiser le feu. Par conséquent, revenons aux fondamentaux de la diplomatie du respect, de la considération et des avantages mutuels ; c’est l’intérêt même de la France, une puissance moyenne, que de calmer le jeu, pour mieux défendre ses intérêts.

Les pays africains, indépendants depuis maintenant 65 ans, sont essentiellement composées d’une nouvelle génération de jeunes, aussi bien pour les gouvernants que les gouvernés, qui n’a jamais pas connu le colonialisme. Les gouvernants africains, comme jadis, Macky SALL, ou maintenant Bassirou Diomaye FAYE, venu deux fois à Paris, ou Ousmane SONKO, sont nés après 1960. Par conséquent, ce serait, gravement, se tromper d’époque que de vouloir continuer les méthodes de la Françafrique, comme au bon vieux temps du fouet, du baston. Vous remarquerez que depuis le sommet de Montpellier, les rencontres franco-africaines ont été abolies. Seuls quelques chefs d’Etats comme le Congo, le Maroc ou la Guinée-Bissau viennent encore à Paris.

Je trouve cela inquiétant pour l’avenir et j’en suis profondément triste. En effet, les Africains sont loin d’être hostiles au peuple français qu’ils admirent profondément. Paris, où va bientôt se tenir le 4ème salon du livre africain, est, comme je le dis souvent, la capitale culturelle de l’Afrique ; j’en rends compte régulièrement dans mes chroniques. Ce qui est en cause c’est d’une part ces régimes monarchiques et dynastiques africains, perpétuant le régime colonial détournant massivement les richesses et forçant les jeunes à l’immigration. D’autre part ce qui est en cause aussi, c’est la façon dont le président Emmanuel MACRON, parfois méprisante et arrogante, traite les gouvernements Africains, et demandant même de le remercier, pour les avoir maltraités. La limitation des visas, l’augmentation des droits d’inscription des étudiants étrangers, ont conduit à un important nombre d’Africains d’aller étudier en Grande-Bretagne, aux États-Unis ou au Canada. Ce changement de cap, dans la durée, pourrait se révéler préjudiciable aux intérêts de la France. Par ailleurs, bien des pays africains songent, en raison de l’hostilité ambiante, à se tourner vers les langues nationales africaines au détriment de la langue française, et à abandonner le FCFA. Qui sera, en définitive, le grand perdant de tout cela ?

Le président angolais, M. Joao LURENçO, un pays après 21 années de guerre civile qui s’est relevé, et a beaucoup investi au Portugal, est à Paris, en visite d’État, un médiateur du conflit entre le Rwanda et le Congo. Je m’en réjouis, pleinement. C’est la voie qu’il faudrait développer et pratiquer avec les pays sous tension (Sénégal, Mali, Tchad, Algérie, RCI). Évitons la politique des dominos.

Contrairement à ce que disent les forces du Chaos, obnubilées par les ennemis de l’intérieur (racisés, musulmans, immigrés, dématérialisation du système de rendez-vous des titres de séjour, un grand scandale !), les pays africains ne sont pas pauvres ; je dirai même que l’Afrique est riche de ses matières premières, mais aussi de sa jeunesse. La vraie richesse d’un pays, c’est la qualité de sa population. Je le redis, partage pleinement la pertinence du diagnostic du candidat Emmanuel MACRON à la présidentielle de 2017, l’Afrique est un «continent d’opportunités» et devrait être respectée. Cependant, notre Président s’est considérablement éloigné de son point initial, que je considère comme étant très pertinent. Comme Martin Luther KING, un de mes maîtres à penser «Il n’est jamais trop tard pour bien faire. C’est toujours le bon moment». Aussi, j’invite notre chef de l’État à abandonner le fouet, pour une diplomatie active du respect et des avantages mutuels. Le Sénégal, la Côte-d’Ivoire comme le Tchad sont des amis traditionnels de la France. En famille on se dispute parfois, mais il ne faudrait jamais abandonner le dialogue.

En définitive, pour moi, le bien-vivre ensemble, et c’est la problématique générale de mes recherches, c’est une chose, c’est le partage du gâteau. Par conséquent, pour reprendre, l’expression du président Emmanuel MACRON, que je ne cesse de louer, l’Afrique comme un «continent d’opportunités». La France fait du commerce avec la Chine, agitée comme un épouvantail, alors qu’une bonne partie de ses entreprises y sont délocalisées. Les Européens, en dépit de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, continuent d’acheter du blé et du gaz au Tsar des Russies. Par conséquent, les États n’ayant pas d’amis, mais que des intérêts, la France a sa juste place en Afrique, en termes d’infrastructures, il est encore très difficile d’aller d’un pays africain à l’autre, sans passer par Paris ou Londres, en termes d’agriculture et d’énergie, ou d’un système éducatif ou de santé performant.

Références bibliographiques

BA (Amadou, Bal), «Afrique : demande de certains pays de départ des bases militaires», Médiapart, 2 janvier 2025 ;

BA (Amadou, Bal), «Libération de Boualem Sansal, un écrivain en otage en Algérie», Médiapart, 23 novembre 2024 ;

BA (Amadou, Bal), «Le salon africain du livre à Paris du 14 au 16 mars 2025», Médiapart, 14 décembre 2024 ;

BA (Amadou, Bal), «Danièle OBONO, députée, une Commission d’enquête sur le massacre du Camp de Thiaroye», Médiapart, 23 novembre 2024 ;

BA (Amadou, Bal), «Le président Emmanuel Macron chahuté au sommet de Montpellier», Médiapart, 10 octobre 2021 ;

BA (Amadou, Bal), «Kémi Séba, déchu de la nationalité française», Médiapart, 10 juillet 2024 ;

BA (Amadou, Bal), «Le sommet de la francophonie à Villers-Cotterêts», Médiapart, 4 octobre 2024 ;

TURPIN (Frédéric), Jacques Foccart, dans l’ombre du pouvoir, Paris, CNRS éditions, 2015, 488 pages ;

GLASER (Antoine), Arrogant comme un Français, Paris, Fayard, 2016, 192 pages.

Paris, le 16 janvier 2025, par Amadou Bal BA

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