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Le baclofène officiellement autorisé pour traiter l’alcoolisme

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C’est l’aboutissement de dix ans d’espoirs et de controverse: le baclofène a été autorisé mardi pour traiter l’alcoolisme, mais à une dose réduite, ce qui mécontente les plus fervents partisans de ce médicament. Le baclofène, décontractant musculaire utilisé par de nombreux alcooliques hors de son indication d’origine, pourra être commercialisé dans le cadre de la lutte contre cette addiction, a décidé l’Agence du médicament (ANSM).

Elle a répondu favorablement à une demande du laboratoire Ethypharm en lui accordant une autorisation de mise sur le marché (AMM) pour le produit qui sera vendu sous le nom de Baclocur (10, 20, 40 mg).

« Ça n’est pas un blanc-seing »
«Ça n’est pas un blanc-seing», a toutefois prévenu le directeur général de l’ANSM, Dominique Martin, selon qui «ce médicament n’est pas anodin et doit être manié avec beaucoup de précautions». Le baclofène ne pourra être prescrit aux alcooliques qu’à une dose maximale de 80 mg/jour, après échec des autres traitements. Ce produit est utilisé depuis les années 1970 comme relaxant musculaire, mais son usage a peu à peu été détourné vers le traitement de l’alcoolisme.

Cet usage alternatif a explosé en 2008 avec la parution du livre «Le dernier verre» d’Olivier Ameisen. Ce cardiologue, décédé depuis, racontait dans son ouvrage comment ce médicament avait supprimé son envie de boire. Depuis 2014, le baclofène était autorisé dans le traitement de l’alcoolisme grâce à une recommandation temporaire d’utilisation (RTU), désormais remplacée par l’AMM. La décision annoncée mardi intervient après une longue controverse: l’efficacité du baclofène est jugée sans équivalent par ses partisans mais l’ANSM insiste sur ses risques.

Un produit à risque
L’Agence s’appuie sur une étude menée avec l’Assurance maladie. Selon elle, le baclofène à fortes doses (plus de 180 mg par jour) fait plus que doubler le risque de décès par rapport aux autres médicaments contre l’alcoolisme, et accroît de 50% le risque d’hospitalisation. C’est la raison pour laquelle l’ANSM avait abaissé l’an passé la dose maximale autorisée de 300 à 80 mg, à la grande fureur de certains patients, qui avaient saisi en vain le Conseil d’Etat.

A l’origine de ces procédures, l’association Baclohelp a contesté mardi le seuil de 80 mg/jour fixé dans le cadre de l’autorisation de mise sur le marché. «Cette décision met en danger» tous les patients ont besoin de se soigner avec des doses supérieures, a-t-elle estimé dans un communiqué. Elle a annoncé son intention d’attaquer à nouveau cette limitation devant le Conseil d’Etat.

« En gros, c’est stop ou encore »
Les partisans du baclofène s’appuient sur plusieurs études, qui démontrent selon eux «l’efficacité et la sécurité du baclofène jusqu’à 300 mg par jour», a souligné Baclohelp. L’ANSM, elle, assure que la majorité des patients alcooliques traités avec le baclofène prennent moins de 80 mg/jour. «Nous allons exercer une surveillance extrêmement attentive de ce produit (celui du laboratoire Ethypharm, ndlr) dès qu’il sera commercialisé», a insisté M. Martin, en précisant qu’il pourrait «y avoir différentes évolutions».

«Si le bénéfice n’est pas celui qu’on attendait et s’il apparaît qu’il faut remettre l’AMM en cause, nous pourrions le faire à n’importe quel moment», a-t-il averti. «Inversement, si des études à venir montrent que dans certaines situations, il peut être utile de dépasser 80 mg/jour, nous sommes ouverts à faire évoluer l’AMM» en augmentant la dose maximale autorisée, a-t-il ajouté. Selon son patron, l’ANSM a pris en compte un «besoin de santé publique» pour prendre sa décision.

«En gros, c’était stop ou encore», a-t-il dit. Ne pas accorder l’autorisation «ne nous aurait pas paru raisonnable au regard des besoins, de la gravité de la maladie alcoolique et du fait que des dizaines de milliers de personnes prennent ce médicament dans le cadre de la RTU». «Le baclofène a enfin une AMM: celle-ci est prudente au regard des effets secondaires liés à son utilisation», a pour sa part commenté l’addictologue Michel Reynaud, président du fonds Actions addictions.

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