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«James BALDWIN (1924 – 1987), écrivain noir américain, ses grandes colères contre les injustices, son sens de la mesure et ses espérances», par Amadou Bal BA

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James BALDWIN avait «une voix nerveuse, anxieuse, douloureuse. Une voix dépouillée, tendue, pressée, toute à l’urgence de témoigner d’une vérité enfouie et cachée : la vérité quant au sort fait aux Noirs américains, étrangers à leur propre patrie, victimes de la violence raciste, de la bêtise raciste, de la ségrégation raciste, de la domination blanche. Une voix antique, comme celles des prédicateurs, tragique comme celle des témoins de meurtres impunis, audacieuse et moderne, troublante comme un gospel, implacable, et fraternelle pourtant. La voix d’un homme écorché vif, obsédé par l’injustice, obsédé Par les meurtres de ses frères de combat pour les droits civiques des Noirs. Obsédé par la nécessité de nommer et de raconter, de témoigner et de venger» écrit, en 2017, Geneviève BRISAC dans la préface de «Si Beale Street parler». En effet, la contribution littéraire de James BALWIN traite de la ségrégation raciale, la haine, les pendaisons, le lynchage, des violences faites aux femmes, de l’orientation sexuelle, de la religion, de la race, d’un profond désir de justice sociale et de fraternité. «Tu es né dans une société qui affirmait avec une précision brutale et de toutes les façons possibles que tu étais une quantité humaine absolument négligeable. On n’attendait pas de toi que tu aspires à l’excellence. On attendait de toi que tu pactises avec la médiocrité» écrit-il dans une lettre adressée à son neveu, dans «la Prochaine fois le feu». Un titre provocateur et inquiétant, en ce moment de révolte contre des réformes injustes en France, ces guerres locales et la remise en cause de la Françafrique. Pour Christian TAUBIRA ce livre est une pépite : «Et croyez-moi nous ferions bien de prendre à la lettre ce titre rugueux. Non que la menace qu’il contient soit de nature à nous faire trembler. Nous sommes une génération blasée. Notre monde inégalitaire se donne à voir, sans pudibonderie. Il est injuste et le montre. Il est violent et l’assume. Il est parfois honni et s’en rit. Il est vrai que, sur un autre versant, il distribue richesses, prébendes, quelques facilités et même une impression de liberté et une illusion de bonheur. Ce livre nous instruit de ce qu’il a compris d’essentiel, à savoir que le corpus de préjugés entretenu par le pouvoir «blanc» n’est ni une œuvre simplement cynique ni une démonstration de force, mais un stratagème aux effets d’asseoir une domination politique et financière conférant légitimité à des règles par lesquelles sont gouvernés ceux qui, en aucune façon, ne sont en situation de participer à l’élaboration de ces règles» écrit dans la préface de la prochaine fois le feu, Christiane TAUBIRA. La démocratie en Occident reste fondée sur un gros mensonge, c’est qu’une institutionnalisation du privilège de l’homme blanc, non pas un contrat social comme l’avait pas appelé Jean-Jacques ROUSSEAU, mais un contrat racial, suivant Charles Wade MILLS : «Baldwin va au point de fracture. Il annonce la possible rupture, préjudiciable à tous, dominants et exclus. Il sait la domination fondée sur un mensonge auquel la majorité des citoyens adhère de bonne foi. Il faut d’abord découdre ce mensonge afin de créer la possibilité d’une société ancrée sur ces principes et valeurs d’égalité bruyamment proclamés, si peu appliqués mais fiévreusement convoqués chaque fois qu’une parole, un acte, une intention assumés s’érigent délibérément en défi à cet ordre établi sur le désordre d’une inégalité institutionnellement organisée. En osant ainsi scruter les obscurités de son époque, non seulement dans leurs manifestations mais dans leurs ressorts, Baldwin nous est contemporain en ce qu’il nous divulgue d’où le chaos tient son amorce. En cela, sa pensée est actuelle, utile et fertile» écrit Christiane TAUBIRA.

Ses romans (Giovanni, mon ami ; Un autre pays ; L’Homme qui meurt), ses nouvelles (Face à l’homme blanc) et ses essais (Personne ne sait son nom ; La prochaine fois, le feu ; Nous, les Nègres ; Le racisme en question) l’ont fait connaître, et il est considéré comme l’un des plus grands écrivains américains de sa génération. Pour James BALDWIN les écrivains ne sont pas des parlementaires, encore moins des procureurs. La littérature n’est ni sociologie ni Histoire. BALDWIN reste un témoin majeur de son époque et a dénoncé les injustices dont les Noir ont été l’objet. «Je sais comment, en grandissant, on voit littéralement s’empiler autour de soi les cadavres de ses frères et sœurs. Pas pour quelque chose qu’ils auraient fait. Ils étaient trop jeunes pour avoir pu fait quoi que ce soit. Mais ce qu’on comprend, c’est quand on essaie de se tenir debout et de regarder le monde en face comme si on avait le droit d’être là, on attaque toute la structure du monde occidental. (…) Ce n’est pas un problème de race. C’est le problème c’est de savoir si vous acceptez, ou non, de regarder votre vie, d’en prendre la responsabilité et puis de vous mettre à la changer» dit BALDWIN. Aussi, dans «Meurtres à Atlanta», James BALDWIN explore la condition des Noirs et des pauvres à Atlanta ou à Harlem, il décrit également celle des Noirs aisés de Brooklyn, des Blancs de la classe moyenne de Paris, de la classe ouvrière de Marseille.

«Aimez ce que j’écris et non ce que je suis» proclame James BALDWIN qui se dit avoir été profondément marqué par un triple particularisme, celui d’être noir, pauvre et homosexuel. «Baldwin nous est contemporain. Par sa personne lorsqu’il dénie à tout autre que lui l’autorité de définir son identité. Par son parcours, ses chemins de traverse, ses feintes et ses astuces de survie, car il faut ne pas périr. Par ses combats à la croisée de plusieurs appartenances, ethnoculturelle, sociale, sexuelle» écrit Christiane TAUBIRA. L’écrivain noir américain James BALDWIN évoque dans la «prochaine fois, le feu», son enfance dans le ghetto de Harlem, en butte au racisme. «Le casse-tête de la couleur est l’héritage de tout Américain, qu’il ou elle soit légalement ou réellement noir ou blanc. C’est un redoutable héritage, pour lequel des foules innombrables, il y a longtemps, vendirent ce qui fait leur patrimoine» écrit-il dans la préface de «Chronique d’un enfant du pays».

Héritier de la tradition du prêche et du sermon des Églises afro-américaines, James BADWIN n’eut de cesse de confronter l’Amérique à ses mensonges et démons. : «Il m’a fallu beaucoup d’années pour vomir toutes les saletés qu’on m’avait enseignées sur moi-même, et auxquelles je croyais à moitié, avant de pouvoir arpenter cette terre comme si j’y étais autorisé» dit-il. Dans la tourmente des mouvements Noirs, BALDWIN devint une voix prophétique, celle d’un «peuple invisible», opprimé, demandant reconnaissance. «C’est l’innocence qui constitue le crime» dit-il. Comme jeune pasteur, puis après avoir quitté l’église comme militant et écrivain, James BALDWIN découvre le pouvoir du verbe et ce que représente d’être «investi d’une parole qui se doit d’être prononcée haut et fort, envers et contre tous ». «Témoigner de la vérité», telle est la tâche que s’assigna James BALDWIN. Sa vie offre un brillant témoignage des forces de l’esprit face à l’adversité et à la discrimination, une preuve criante du pouvoir des idées et des mots pour changer la société et les hommes. Son rôle en tant qu’artiste, comme il le disait lui-même, est «d’illuminer cette obscurité, de tracer des chemins à travers de vastes forets pour que nous ne perdions pas de vue le sens dans l’effervescence de nos actes, et pour que nous fassions du monde un endroit plus habitable». Ce qui fait la grande actualité de la contribution littéraire de James BALDWIN réfugié en France, pays des droits de l’Homme, qui écrivait dans un contexte de ségrégation raciale aux Etats-Unis. Cependant, en raison de ce contrat racial, ou Code de l’indigénat ne disant pas son nom, le racisme, la négrophobie ou l’islamophobie, n’ont pas de nos jours disparu ; tout au contraire, ils se sont profondément métamorphosés et dilués à travers divers concepts hypocrites, au point d’être devenus méconnaissables, acceptables et légitimés par des succès électoraux de l’extrême-droite, dans les sociétés occidentales contemporaines (Laïcité, immigration terrorisme, islamisme, prétendue défense de la femme musulmane, assistanat, la libération extraordinaire de la parole raciste avec des stigmatisations calomnies, contrôles d’identités au faciès, avec parfois une permission de tuer, d’étouffer à mort le jeune racisé, le refus du multiculturalisme, ou l’accès aux lieux de décisions économiques, politiques et culturels, etc.). «Unanimement condamné depuis un demi-siècle, le racisme n’a pas pour autant disparu. Il s’est métamorphosé, au point d’être devenu parfois méconnaissable. Et il s’est, à bien des égards, planétarisé. Il s’est par là même banalisé, normalisé. Sa forte spécificité scandaleuse, liée à son exceptionnalité visible, semble s’être effacée, comme diluée. Reconnu à peu près partout, en toute passion négative (haine, mépris, ressentiment), en toute discrimination et en toute forme d’exclusion, voire en toute extermination de masse, interprétée spontanément comme « génocide », donc comme réalisation planifiée d’un programme politique «raciste», il est devenu conceptuellement flou et paraît désormais faire partie du paysage. Le Mal absolu est devenu le mal ordinaire» écrit Pierre-André TAGUIEFF, en 1998, dans un article, «le racisme». Pour les déterministes, en effet, le comportement des groupes humains et leurs différences sont innés. Il en ressort invariablement que les opprimés, les désavantagés, et donc les racisés, sont inférieurs et méritent donc leur statut d’indigènes de la République.

James Arthur BALDWIN est laid et petit, mais il sait faire, avec ses écrits du grand bruit, un passage furieux sur terre. Né de père inconnu le 2 août 1924, à Harlem (New York), avec un père adoptif, David BALDWIN (1888-1943), un pasteur originaire de la Louisiane, un homme violent et tourmenté, obsédé par la faute et le châtiment, qui prêche la parole pentecôtiste dans des entrepôts désaffectés de Harlem. David BALWIN est un religieux rigoriste et pervers aimant à humilier et faire souffrir James. . «Si le concept de Dieu a une validité ou une utilité, ce ne peut être que pour nous rendre plus grands, plus libres et plus aimants. Si Dieu ne peut pas faire cela, il est temps que nous nous débarrassions de Lui» écrira James BALDWIN, dans «La prochaine fois le feu». Cependant, il estime que la foi, c’est aussi une forme d’espérance «La foi est la substance de l’espoir, la preuve de ce que l’on ne voit pas» citant Saint Paul, épitre 11-1. Sa mère, Emma Berdis JONES (1900-1999), originaire du Maryland, faisant des ménages pour nourrir neuf enfants (quatre garçons et cinq filles). Emma s’est remariée, le 2 mai 1927, alors que James avait trois ans. Sa mère refusera toujours de lui révéler l’identité de son père biologique.

Au début de son adolescence, James BALDWIN a fréquenté la Frederick Douglass Junior High School, où il a rencontré son professeur de français et mentor Countee CULLEN, qui s’est fait connaître en tant que poète de la Renaissance de Harlem. Il est allé à la DeWitt Clinton High School, dans le Bronx, où il a édité le magazine littéraire de l’école Magpie et a participé au club littéraire. Il rencontrera, en 1944, Richard WRIGHT, qui a participé à sa formation intellectuelle. Le jeune James commence par découvrir les vertus de la lecture en fréquentant assidûment la bibliothèque publique de son quartier. C’est son institutrice qui lui donne le goût de la lecture «A ce moment-là, j’avais été pris en main par une jeune institutrice blanche du nom de Bill Miller une belle femme, très importante pour moi. Elle m’a donné des livres, m’a parlé de ces livres et du monde : de l’Ethiopie, de l’Italie, et du Troisième Reich allemand. Elle m’a emmené voir des pièces et des films auxquels personne n’aurait imaginé emmener un garçon de dix ans» dit-il. Jeune, il croyait que les Blancs étaient des héros «Parce que Oncle Tom refusait de se faire vengeance, il n’était pas un héros pour moi. Aussi loin que je m’en souvienne, les héros étaient des Blancs, pas seulement à cause des films, mais à cause du pays dans lequel je vivais et que les films ne faisaient que refléter» dit-il. Prédicateur à 14 ans, l’adolescent rompt avec les bondieuseries à 17 ans, à cause de ses mauvais rapports avec son père adoptif, mais aussi de sa condition de misérable, James BALDWIN quitte Harlem et travaille comme ouvrier, puis plongeur et aide de cuisine. Il s’installe alors à Greenwich Village, lieu de la marginalité par excellence, où s’affirme son homosexualité. Il découvre surtout sa vocation littéraire. Il écrit d’abord des articles pour des revues, avant de s’attaquer à la fiction. Aucun éditeur n’accepte ses textes.

En 1948, James BALDWIN décide de s’installer à Paris, dans le quartier de Belleville, où il retrouve d’autres Américains expatriés. Ayant achevé son premier roman, «Les élus du Seigneur», il repart à New York en 1952 pour essayer de se faire publier. Il écrit une pièce de théâtre, «Le coin des Amen», qui ne sera jouée que dix ans plus tard. Peu à peu, il se révèle comme le porte-parole du mouvement intégrationniste. Il revient à Paris, puis s’installe à Saint-Paul-de-Vence où il meurt le 30 novembre 1987. En effet, James BALDWIN est un amoureux de la France : «A Paris, j’ai réussi à me débarrasser de tous les stéréotypes dont m’avaient infligé mes concitoyens… Et, une fois que vous vous en êtes débarrassé, c’est irréversible !… A Paris on me laissait tranquille – tranquille de devenir ce que je voulais devenir… Je pouvais écrire, penser, ressentir, marcher, manger, respirer librement. Aucune sanction ne venait frapper ces simples faits humains» dit-il. C’est en France James BALDWIN a connu sa période la plus faste, c’est en France qu’il a écrit ses plus grandes œuvres de fiction : «La Conversion», «La chambre de Giovanni» et «Un autre pays». Venu en France à 24 ans, en novembre 1948, il était d’abord parti poussé par un sentiment d’urgence. Noir, homosexuel et pauvre, il avait tout à craindre de l’intolérance qui sévissait à New York au milieu du siècle dernier. Au moment du départ, «ce n’était pas tant le choix de la France, il s’agissait avant tout de quitter les États-Unis. Si j’étais resté, j’aurai sombré. (..) Les années que j’ai passées à Paris m’ont apporté une chose : elles m’ont libéré de cette terreur sociale-là qui n’était pas le fruit de mon imagination, une paranoïa, mais un danger social bien réel et visible sur le visage de tout flic, de tout patron, de tout le monde», écrit-il. Dans la préface de sa pièce de théâtre, «le Coin des Amen», James BALDWIN est encore plus explicite sur les raisons de son exil : «Personne ne veut vraiment quitter son pays. J’étais parti parce que j’étais chassé du mien, parce que mon pays ne me permettait pas de grandir dans la direction que pusse prendre» dit-il. Il décrit les conditions de son arrivée en France : «J’arrivai à Paris avec quarante dollars et sans un mot de français». Cependant, le regard des Français sur les Noirs américains est différent de celui des New Yorkais Blanc : «La pauvreté n’est pas un crime à Paris ; elle ne signifie pas que vous êtes bon à rien».

Mais ce choix de la France ne relève pas entièrement du hasard, il s’inscrit dans un mouvement déjà suivi par nombre d’artistes noirs américains, ou de personnalités en exil comme Joséphine BAKER ou l’écrivain Richard WRIGHT, le mentor de James BALDWIN. «Durant mes années à Paris, rien d’américain ne m’avait jamais manqué, ni les gaufres, ni les glaces, ni les hot-dogs, ni le baseball, les majorettes, les films, ni l’Empire State Building, ni Coney Island, ni la Statue de la Liberté, ni le Daily News, ni Times Square. J’ai laissé derrière moi toutes ces choses. Elles auraient aussi bien pu n’avoir jamais existé, et les revoir ou non m’était absolument égal» dit BALDWIN. C’est finalement en France que BALDWIN s’installa en 1970, après des années d’errance entre Paris, la Suisse et la Turquie. Il emménagea dans un mas à Saint-Paul-de-Vence, et devint l’une des figures emblématiques de l’endroit et joua les hôtes pour la communauté noire américaine de passage en France, offrant le gîte aux plus illustres artistes de l’époque, Miles Davis, Harry Belafonte, Ella Fitzgerald ou Nina Simone. «James Baldwin a aimé la France. Mais la France se souviendra-t-elle de lui ?», écrit Raoul PECK.

Notre juste colère ne devrait pas nous aveugler. Ce que nous réclamons c’est notre juste place au sein de la société et dans le respect mutuel. On peut tenir ferme dans ses convictions en rejetant toute haine ou violence inutile parce que notre cause est fondée sur la justice. «Nous avons un cœur tendre, mais un esprit ferme» disait Martin Luther KING qui a fortement impressionné James BALDWIN. Quand on a raison, on doit pouvoir se préparer pour mourir, s’il le fallait, pour défendre une noble cause. Il n’y aura pas de paix durable sans justice et égalité. De ce point de vue, la lecture de la contribution littéraire de James BALDWIN m’a rassuré et conforté dans mes convictions que le sectarisme n’a aucun sens qu’en revanche, le respect de soi et l’Amour sont de puissantes armes contre la haine destructrice. James BALDWIN est resté animé du sens de la mesure, et nous exhorte dans ce combat contre le Mal à ne pas perdre de vue l’essentiel, le Bien finira par triompher.

I – James BALDWIN, l’écrivain, militant des droits civiques

1- James BALDWIN et sa rencontre avec Martin Luther KING

Dans «Retour dans l’œil du cyclone» James BALDWIN revient sur les circonstances de sa rencontre avec Martin Luther KING et sa contribution dans la structuration idéologique du mouvement des Noirs. Ce qui frappe chez Martin Luther KING, dit BALDWIN c’est son éloquence. «Ce qu’il dit aux Noirs, il le dit aux Blancs ; ce qu’il dit aux Blancs, il le dit aux Noirs» dit-il. Les anciens dirigeants noirs avaient un discours ambigu, ils disaient aux « Blancs dépêchez-vous et au Noirs, attendez !». Cette clarté de Martin Luther KING en dit long sur lui-même. «Jamais il n’a été en conflit avec lui-même. KING aime réellement les personnes qu’il représente et ne ressent, par conséquent, aucun besoin caché, intime de détester les Blancs qui s’opposent à lui» souligne James BALDWIN. Martin Luther KING ne cherchait pas à provoquer des changements objectifs dans la vie de ses auditeurs. L’unique chose qu’ils venaient de chercher était la nourriture spirituelle nécessaire pour affronter les aléas d’une journée d’existence de plus. En revanche, les Noirs peuvent changer leur situation, s’ils le veulent. Martin Luther KING n’étant pas un démagogue, n’offre pas de réconfort facile. Il demande à ses ouailles le respect de soi et insiste pour qu’il y ait respect de soi : «Nous savons qu’il y a beaucoup de choses qui vont mal dans le monde blanc. Mais, il y a beaucoup de choses qui vont mal dans le monde noir, aussi. Nous ne pouvons continuer de blâmer sans cesse l’homme blanc. Il y a beaucoup de choses que nous-mêmes devons faire par nous-mêmes» dit Martin Luther KING. James BALDWIN a retenu une grande leçon de la vie de Martin Luther KING, à savoir que «le sectarisme est une maladie et que la première victime de cette maladie n’était pas la cible du sectaire, mais le sectaire lui-même. Et seul l’Amour pouvait sauver ces gens. Qu’en se libérant soi-même, il était possible de les libérer aussi».

James BALDWIN devient «l’intellectuel», la tête pensante du mouvement des droits civiques que dirige le jeune pasteur noir Martin Luther KING. En dépit de sa célébrité, il sera critiqué de toutes parts, son approche de la question raciale, base de toute la problématique, ayant été jugée insultante pour les Noirs. Certains de ses détracteurs iront jusqu’à l’accuser de «haine de soi» en tant que Noir. Que prône-t-il, au juste ?

Il insiste sur le rejet de la haine de l’autre, et prône sur ce qui rapproche le Blanc du Noir, plutôt que ce qui les sépare. Cette recherche de consensus, cette conjuration de l’affrontement par l’amour est résumée dans son livre The Price of the Ticket paru en 1985. Il écrit : «Chacun de nous, inéluctablement et à jamais, contient l’autre – il y a de l’homme dans la femme, de la femme dans l’homme, du Blanc dans le Noir, et du Noir dans le Blanc. Nous sommes une partie de chacun. Beaucoup de mes compatriotes semblent trouver cela très malcommode et même injuste. Mais personne n’y peut rien» dit-il. En effet, James BALDWIN, l’homme et son œuvre, jette un pont entre les continents et les hommes Intellectuel modéré, James BALDWIN ne laissa jamais séduire par une politique du ressentiment, préférant la nuance et la complexité. «J’imagine qu’une des raisons pour lesquelles les gens s’accrochent à leurs haines avec tellement d’obstination, est qu’ils sentent qu’une fois la haine partie, ils devront affronter leurs souffrances» dit-il dans «Chronique d’un pays natal». BALDWIN a toujours essayé de trouver cette humanité, y compris chez ceux-là même qui détestaient les gens comme lui. Il savait que la haine et l’intolérance sont des poisons jumeaux pour ceux qu’ils affectent, qu’ils soient persécuteurs ou persécutés. Nous sommes tous, indépendamment de nos identités individuelles et des circonstances, enfermés dans les rôles que nous devons jouer. «Tous les rôles sont dangereux, c’est toujours très difficile de garder du recul, une distance critique entre soi tel qu’on semble être et soi tel qu’on est réellement» dit-il. Dans la lutte pour les droits civiques, James BALDWIN a produit deux ouvrages de propagande pour l’égalité des droits : «La prochaine fois, le feu» et «Personne ne sait mon nom».

2 – James BALDWIN et son ouvrage «La prochaine fois, le feu»

Dans «La prochaine fois, le feu», en lisant la préface d’Albert MEMMI, une sourde frayeur s’empare de vous. «Tous les opprimés se ressemblaient. (…). Tous, ils subissent un joug qui laisse qui laisse des traces analogues dans leur âme et imprime un gauchissement similaire dans leurs conduites» souligne MEMMI. «La prochaine fois, le feu» est la mise en la dénonciation de la ségrégation raciale et la prétendue supériorité des Blancs qui serait conforme à la volonté divine, en raison de la malédiction de Cham. «Le monde est blanc et ils sont noirs» dit-il. Tout ce qui fait que «bien avant que l’enfant noir ne le perçoive et plus longtemps encore avant qu’il ne la comprenne, il a commencé à en subir les effets, à être conditionné par elle», à se mépriser. «Chaque homme porte en lui la forme entière de l’humaine condition» dit Michel MONTAIGNE. Mais, pour ce qui est de l’homme noir, BALDWIN démonte qu’il porte en plus de cela la condition que l’homme blanc lui a assignée dans la société des hommes. Partout, en effet, les Noirs ne comprennent pas pourquoi les Blancs les traitent comme ils le font. Cette persécution, incompréhensible, qui confine le Noir dans son ghetto, rend la communication difficile ou impossible avec les autres, en raison d’une absence de mixité. «Je savais comment lutte en moi, la tendresse et l’ambition, la douleur et la colère et l’horrible écartèlement que je subis entre ces extrêmes» écrit James BALDWIN. La peinture qu’il fait alors des Noirs opprimés donne la sensation d’entendre gronder une sourde colère. «C’est une terrible découverte de l’opprimé lorsqu’il comprend qu’il n’a plus rien à perdre» dit Albert MEMMI. En dépit de ce constat sombre, James BALDWIN est d’une humanité bouleversante puisqu’il indique de manière claire l’alternative, seule capable d’arrêter cette course infernale de la pensée blanche nourrie par la chrétienté vers sa fin.

Mais ce qui fait que le ton reste effroyable, c’est que ceux qui en détiennent la clef n’en sont nullement conscients. Seul l’amour peut sauver le monde. Les Blancs en sont-ils capables ? Qui pourrait les réveiller pour qu’ils arrêtent cette machine infernale qui va les emporter et certainement nous avec eux ? La deuxième solution, un pendant de l’amour, c’est de «transcender les réalités sociales et religieuses». James BALDWIN assigne au mot «intégration» un sens précis : «Nous, à force d’amour, obligerons nos frères à se voir tels qu’ils sont, à cesser de fuir la réalité et à commencer à la changer». James BALDWIN a prévenu à défaut de cette solution fondée sur l’Amour, la prochaine fois, ce sera le feu. «Sache d’où tu viens. Si tu sais d’où tu viens, il n’y a pas de limite à là où tu peux aller» dit BALDWIN. Le Noir américain sait maintenant qui il est et quelle sa place réelle au milieu de ses concitoyens. Lorsqu’un opprimé a entrevu la possibilité d’être libre et qu’il accepte d’en payer le prix, il est vain d’espérer encore la paix pour longtemps. James BALDIN a posé correctement le problème : l’Amérique doit accepter de devenir une nation multiraciale ou la confrontation, la guerre. En effet, BALDWIN nous rappelle cette prophétie de la Bible : «Et Dieu dit à Noé, vois l’arc en ciel bleu. L’eau ne tombera plus. Il me reste le feu».

3 – James BALDWIN et son ouvrage «Personne ne sait mon nom»

«Personne ne sait mon nom», c’est le témoignage pathétique d’un homme qui lutte, pour que prenne fin le drame qui déchire les États-Unis. James BALDWIN en militant actif des droits civiques qui avait accompagné Martin Luther KING, y évoque son séjour en Europe ; il détaille ses impressions, lors de son retour en Amérique et à Harlem, de son premier voyage dans le Sud au moment où éclatait la bataille pour l’intégration scolaire. Ce recueil d’essais contient en outre des portraits pénétrants de Richard WRIGHT et de Norman MAILER, une critique passionnée de la défense du vieux Sud par William FAULKNER et une peinture de Harlem qui a suscité de véhémentes controverses. Le problème noir occupe une place importante dans ce maître livre et de nombreux thèmes apparaissent sans cesse : relations entre Blancs et Noirs, rôle des Noirs en Amérique et en Europe, question de l’identité sexuelle. Une préoccupation essentielle domine l’ensemble : faire face à la vérité, qu’elle plaise ou non, car c’est là, affirme James BALDWIN, le rôle et la justification de l’écrivain. Aucun auteur, qu’il soit blanc ou noir, n’a exposé avec une telle intensité et une telle éloquence les revendications d’une minorité opprimée, tout en condamnant avec vigueur les excès des extrémistes de tous bords.

II – James BALDWIN, un écrivain sur la question identitaire et les relations raciales

«Chassés de la lumière» ou «No Name in the Street» considéré comme un roman autobiographique, la question raciale est le fil rouge. James BALDWIN y relate des faits intimes mais aussi une histoire tragique des Etats-Unis, notamment les assassinats de Medgar EVERS (1925-1963), Malcolm X (1925-1965) et surtout de Martin Luther KING (1929-1968). En effet, l’auteur témoigne et dénonce la violence et l’injustice qui naissent et grandissent dans la haine raciale. Ce livre, «chassé de la lumière» reste d’une grande actualité, la question raciale continuant à être l’un des problèmes les plus importants et urgents dans le monde occidental, de la montée du Rassemblement national en France, et donc de la libération extraordinaire de la parole raciste.

Ces assassinats politiques blessent profondément et font douter BALDWIN de la capacité des Etats-Unis, dans ce «contrat racial» à pouvoir se réformer. Il va désormais passer la majeure partie de son temps en Europe, s’installant d’abord à Istanbul, de 1965 à 1967, puis, en France, à partir de 1970. Il faudra attendre, en 1974, le roman «Si Beale Street pouvait parler» pour voir l’écrivain renouer avec un certain optimisme et adopter un nouveau credo : l’amour comme ultime moyen de survie. Son dernier chef-d’œuvre, en 1919, «Harlem Quartet» nous présente en une symphonie fantastique, toute la gamme des sentiments humains. «J’aimerais me servir du temps qui me reste pour changer le monde. Pour enseigner aux enfants ou transmettre aux gens qui ont des enfants, l’idée que la vie est sacrée» dit-il. Ce roman magistral, où la violence et l’érotisme sont constamment maîtrisés par la tendresse et l’humour du poète, est, comme l’écrit dans la préface Alain MABANCKOU «l’un des plus beaux chants de fraternité, d’amour, d’espérance et d’expiation».

Dans «l’homme qui meurt», ou «Tell me How Long the Train’s been Gone», James BALDWIN raconte à la première personne l’histoire d’un célèbre acteur noir américain, Léo PROUDHAMMER. Ce comédien de trente-neuf ans, un soir, au cours d’une représentation dans un théâtre de San Francisco, est terrassé par une crise cardiaque. Transporté à l’hôpital, il se voit imposer une période d’immobilité au cours de laquelle il revit en pensée son enfance, sa jeunesse et les débuts de sa carrière d’acteur. « L’homme qui meurt » est un roman dans lequel il raconte comment, à 10 ans, battu par des policiers blancs, il découvre qu’il est noir. Il a quitté les Etats Unis dit-il pour éviter de devenir fou comme son père, drogué ou criminel. BALDWIN incarne le sens de la mesure. Militant des droits civiques engagé et l’écrivain passionné, il refusait toute catégorisation, qu’elle soit raciale, sexuelle, religieuse ou politique. Il représente une position particulière, non conforme dans l’univers des auteurs noirs américains. Position qui lui permet de développer une pensée complexe, libérée de tout dogme. La question de l’Autre, de son humanité, et la reconnaissance de l’Autre en soi, est centrale chez BALDWIN. En ce sens, bien que profondément critique envers la société blanche américaine, il évitera les amalgames faciles, les tentations manichéennes : «Il faut arracher ces masques sans lesquels nous craignons de ne pouvoir vivre» écrira-t-il.

«La Conversion» est un roman semi-autobiographique qui raconte l’histoire d’un jour, son anniversaire, dans la vie d’un pauvre gamin de 14 ans, John Grimes, qui passe la majeure partie de son temps à parcourir les rues de New York et à méditer sur les différents démons qui règnent sur sa vie : son beau-père, un prédicateur violent, son église, et la société raciste dans laquelle il a eu le malheur de naitre. Le roman capture un aspect essentiel de la vie en Amérique, ses contradictions et ses séductions, ce mélange aigre-doux d’amour et de haine que beaucoup ressentent envers le pays. Tourmenté par l’idée de péché, après être allé jusqu’aux racines de sa culpabilité, il lui semble à l’aube du dimanche avoir connu son moment de vérité. Dans ce premier roman écrit en 1952, James Baldwin raconte, avec des accents d’une sincérité déchirante, à la fois son expérience et une odyssée collective, celle d’une famille aux attitudes violemment contrastées, celle d’un peuple venant du Sud rural dans un ghetto du Nord. Ce roman, devenu un classique, est un des premiers livres sur la condition des Noirs.
«La chambre de Giovani» décrit les histoires d’amour tourmentées et douloureuses d’un jeune Américain à Paris dans les années cinquante. La sincérité et l’audace avec lesquelles James BALDWIN décrit le trouble émotionnel de David, déchiré entre Giovanni, un homme, et Hella, une femme, font de ce livre un classique. Se réfugiant derrière un choix qu’il croit possible, il ne réussit que très maladroitement à ne pas s’avouer que le seul mal dont il souffre et qu’il répand derrière lui n’est en fait que son incapacité d’aimer. Tout choix alors lui est dès le départ impossible. Comment peut-on choisir entre deux êtres que l’on croit aimer alors que ces deux amours en fait n’existent pas. Le mensonge de l’un génèrera la violence de l’ange. C’est beau, c’est magnifiquement écrit, une véritable tragédie. Le narrateur est lâche, une « honteuse », qui plus est, loin de son Amérique puritaine natale et de son père : un peu facile ! L’auteur réussit cependant à nous faire prendre en affection Giovanni dans le sort qui l’attend, et à nous faire détester ou prendre en pitié un narrateur englué, malgré lui, dans les conventions de son époque.

Dans «un autre pays», Rufus SCOTT n’en pouvait plus de vivre dans le monde cruel et implacable des Blancs, humilié, abandonné de tous, écrasé par le poids d’une cité inhumaine. Par une nuit froide de novembre, il est allé s’engloutir à jamais dans l’eau glacée du fleuve. Ce drame est le point de départ d’une œuvre émouvante, violente et passionnée dont les personnages, à la recherche d’eux-mêmes et du bonheur, tentent désespérément de renverser les barrières de la ségrégation raciale et des conventions bourgeoises.

«Le coin des Amen», est une pièce de théâtre dans laquelle sœur Margaret, séparée de son mari Luke, trompettiste de jazz, et vivant avec leur jeune fils David, célèbre le culte dans l’église d’une communauté noire. Ce qu’évoque James BALDWIN ce n’est une catégorie de personnes, non pas parce qu’ils sont Noirs, mais parce qu’ils appartiennent à la catégorie de personnes les plus défavorisées de New York. Mourant d’alcoolisme, Luke revient vers sa femme, tandis que David, au contraire s’en va, révolté par le milieu étroit et dévot où il a vécu. Qu’enseigne souverainement le Seigneur ? Une loi unique triomphe de tous les hommes et de tous les cantiques, celle de l’amour absolu entre les hommes. La préface écrite en excellent anglais par BALDWIN pour présenter son texte donne au lecteur un étonnant tableau autobiographique de ce très grand écrivain noir. BALDWIN considère qu’écrire cette pièce est un «geste désespéré et un peu dément». Il s’agit de traiter des «aspects obscurs» de la vie des Noirs. «L’amour, la compassion qui viennent toujours à nous, sous des aspects inattendus, n’ont rien à voir avec la couleur de peau» souligne James BALDWIN. Il explique les motivations profondes qui ont abouti à l’écriture de cette pièce de théâtre. Il pense d’abord à lui-même : «C’est terrible à penser que l’amour ne meurt jamais ! Cette ligne, bien entendu, en dit plus long sur moi, toute la pièce en dit plus long sur moi». BALDWIN pense, non seulement à l’atroce détresse de sa vie privée, mais aussi aux souffrances de son père «au pesant fardeau qu’avait porté son père. J’étais d’âge, enfin !, à comprendre combien dure avait été sa vie». BALDWIN pense aussi à sa mère qui a élevé ses neufs enfants «aux stratagèmes auxquels elle était forcée de recourir pour sauver ses enfants de la destruction qui les attendait sur le pas de la porte». Dans cette pièce de théâtre, «Le Coin des Amen», James BALDWIN entrevoit l’espoir, la clef du Royaume. « Le Royaume, c’est l’amour. L’amour n’est pas un retour en arrière vers le Moi, bien que seul le Moi puisse nous conduire à lui» dit-il.

Dans «Chassés de la lumière, la «question noire» est inséparable de la révolution. «Cette histoire n’a été qu’un joug intolérable, une horrible prison, une tombe», écrit-il. De quoi BALDWIN parle-t-il dans «Chassés de la lumière» ? Il y évoque l’histoire des Noirs écrite par les Blancs en général, et par William FAULKNER, en particulier, mais aussi de l’histoire des Noirs écrite par des Noirs subjugués par le joug blanc. L’Histoire est un piège. Soulever le joug, faire tomber les murs de cette prison, ouvrir cette tombe, tel est le défi que James BALDWIN releva en dramaturge, romancier et essayiste noir américain. «Les risques sont si grands et le chemin à parcourir si long encore et si dangereux qu’il n’y a pas de temps à perdre et que chaque action en acquiert un caractère d’urgence impersonnelle», poursuit-il. Ouvrage de propagande, James BALDWIN y achève sa radicalisation politique. Véritable récit de la crise de la suprématie blanche, Chassés de la lumière est une traversée des années 1960, de leurs luttes, de leurs espoirs ; c’est aussi la fresque amère d’une Amérique blanche agrippée à ses privilèges. L’œuvre de BALDWIN trace un chemin de libération, et l’énigme de son écriture est à déchiffrer dans le fait que, pour lui, ce chemin est nécessairement tortueux. C’est ce qui fait l’unité de son approche : isoler des points de vue et les faire travailler, réfléchir, penser et repenser une situation. «La vérité qui libérera les Noirs libérera aussi les Blancs mais ceux-ci ont du mal à l’accepter» dit-il. Cette affirmation qu’il n’est pas possible de libérer les Noirs sans libérer les Blancs, une solidarité de tous les opprimés.

C’est à Saint-Paul de Vence qu’il finit ses jours le 1er décembre 1987, un an après avoir reçu la Légion d’Honneur des mains du président MITTERRAND. «Peut-être l’origine de toutes les difficultés humaines se trouve-elle dans notre propension à sacrifier toute la beauté de nos vies, à nous emprisonner au milieu des totems, tabous, croix, sacrifices du sang, clochers, mosquées, races, armées, drapeaux, nations, afin de dénier que la mort existe, ce qui est précisément notre unique certitude. Il me semble à moi que nous devrions nous féliciter de l’existence de la mort, nous décider à gagner notre mort en faisant passionnément face aux mystères de la vie. Nous sommes responsables envers la vie. Elle est le point lumineux dans toutes ces terrifiantes ténèbres desquelles nous sommes issus et auxquelles nous retournerons. Il nous faut négocier ce passage aussi noblement que nous en sommes capables par égard à ceux qui viendront après nous», écrit James BALDWIN dans «La prochaine fois, le feu». Cependant, James BALDWIN se dit optimiste : «Je suis obligé de croire que nous pouvons survivre à ce qui met notre survie en jeu. L’avenir des Noirs dans ce pays sera exactement aussi radieux aussi sombre que celui du pays. C’est entièrement au peuple américain et à ses représentants, qu’il revient de décider s’il va, ou non, regarder en face cet étranger qu’il calomnie depuis si longtemps, s’occuper de lui et l’embrasser. Ce que les Blancs doivent faire, c’est de trouver au fond d’eux-mêmes pourquoi, tout d’abord, il leur a été nécessaire d’avoir un «Nègre», parce que je ne suis pas un «Nègre», je suis un Homme» disait BALDWIN.

BIBLIOGRAPHIE SELECTIVE

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Paris, le 21 mai 2016 par Amadou Bal BA, actualisé le 29 avril 2023, – http://baamadou.over-blog.fr/

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