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«Jacob DESVARIEUX : musicien humaniste et sympathique du groupe Guadeloupéen KASSAV, le plus Africain des musiciens antillais» par Amadou Bal BA –

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Des nouvelles alarmantes, confuses et contradictoires ont circulé à propos de Jacob DESVARIEUX. Plusieurs fois déclaré mort, la famille a démenti ces folles rumeurs. En effet, Jacob DESVARIEUX, chanteur, musicien, arrangeur et producteur, lutte contre la mort. M. Jacob DESVARIEUX, diabétique et d’une insuffisance rénale, est hospitalisé sous coma artificiel. Une situation particulièrement préoccupante à suivre. Nous sommes avec Jacob de tout cœur. Cette cochonnerie nous a déjà fauché Pape DIOUF, Manu DIBANGO et bien d’autres grands artistes ou des anonymes. Et le virus progresse aussi de façon inquiétante au Sénégal. Je suis en profond désaccord politique avec le président MACRON. Cependant, le chef de l’Etat en charge de la santé de tous, a raison d’instaurer un Pass sanitaire ; espérons qu’il sera ferme. Quand j’en avais parlé quelques jours auparavant, notamment à propos du variant Delta, je me suis fait insulter sur Facebook.

J’ai connu Jacob DESVARIEUX à l’occasion de la dernière campagne législative en 2017 de George PAU-LANGEVIN dont il était un fervent soutien, depuis 2012. Jacob qui n’avait pas la grosse tête, avait longuement discuté avec mon fils Jean-Philippe. En effet, Jacob DESVARIEUX issu d’une famille très modeste, est resté très solidaire avec les racisés et les nobles causes, tout en restant discret sur ses engagements humanitaires, sans en faire un objet de promotion personnelle : «On réalise beaucoup d’œuvres humanitaires. Pour nous, quand on a la chance d’avoir de la notoriété, on doit donner aux gens qui nous l’ont donnée. On se rend compte également que les gens que l’on aide n’ont pas envie de servir de publicité» dit, fort modestement, Jacob DESVARIEUX, un musicien humaniste.

Quelques mois après sa naissance, le 21 novembre 1955, à Paris, sa mère, Cécile DESVARIEUX (1922-2016), dite Lucienne, originaire de Saint-François, en Guadeloupe, alors qu’il n’a que trois mois, part s’installer en Martinique, mais un cyclone, Dorothy, détruira leur maison. Aussi, par l’intermédiaire du BUMIDOM, Mme Cécile DESVARIEUX va s’installer au Vésinet, dans les Yvelines, pour faire des ménages.

Jacob DESVARIEUX est le plus Sénégalais et le plus Africain de tous les artistes antillais. Il a séjourné à Dakar notamment entre 1966 et 1968. En effet, sa mère, Cécile DESVARIEUX, l’emmène au Sénégal «J’avais dix ans, quand ma mère, une couturière, prit la décision de s’installer en Afrique ; ses amis lui conseillaient de visiter ce continent dont l’image est déformée par les médias de l’époque. On racontait que ce sont des sauvages comme dans Tarzan, la misère, les huttes, les guerres tribales, les catastrophes ; autant de clichés qu’elle voulait combattre. Nous avons pris le bateau et débarqué à Dakar. Je suis allé à l’école là-bas. J’y ai appris mes premières notes de guitare avec des frères du quartier, et j’en garde des souvenirs très précis. Il faut croire que j’étais prédestiné pour cette rencontre avec l’Afrique. Ce sont mes origines. Dès le premier contact, avec ce continent, je me suis senti chez moi, comme aux Antilles. Je pense que tous les Antillais devraient aller, au moins une fois, en Afrique. J’apprécie leur sagesse, le respect qu’ils ont des aînés» dit Jacob DESVARIEUX. Sa mère, pour ses dix ans, lui offre une guitare, mais il aurait préféré un vélo : «Ce n’était évidemment pas ce que je voulais. Comme, elle était là, à un moment donné j’ai appris à en jouer. J’avais pour voisin le musicien Adama Faye. Il se servait d’ailleurs de ma guitare pour assurer ses shows. Et tous ses petits frères savaient en jouer et moi pas. Ça m’énervait ! Ils sont d’ailleurs aller très loin dans la musique. L’un d’eux n’est autre que le bassiste de Youssou N’dour» dit-il.

En France, le groupe KASSAV, dont Jacob DESVARIEUX était l’un des fondateurs, considéré comme folklorique, n’était pas vraiment pris au sérieux. Jacob DESVARIEUX connait bien de nombreux pays africains, comme le Congo, mais c’est en Côte-d’Ivoire que le succès a commencé à émerger ; il a touché un cachet de 1,5 million de FCA. Le concert de Bouaké 25000 spectateurs : «C’est en Côte d’Ivoire que les choses sont véritablement parties. On a joué tout d’abord pour une ONG des femmes appelée Soroptimist. Après, on est allé à Bouaké. C’était en 1985. Où on a joué devant 35 000 personnes. C’était inimaginable. Vous savez, nous, nous venons de petites îles pas du tout peuplées» dit-il. Jacob DESVARIEUX déplore le piratage de la musique, notamment en Afrique «A partir du moment où l’on ne vend pas de disques, il ne nous est plus possible de financer les tournées. Le piratage est carrément devenu la forme de distribution officielle en Afrique. Les disques piratés représentent 90% du marché et les Etats sont plus ou moins complices» dit-il. Deux concerts à Luanda, au Mozambique, avec 90 000 spectateurs, ont secoué le cocotier. A Luaka, en Angola, 30 000 spectateurs ont été le prélude d’une tournée triomphale dans de nombreux pays africains. Par conséquent, il a fallu que KASSAV remplisse des stades en Afrique, pour que la presse française les prenne, enfin, au sérieux. Ils sont invités à l’émission Zénith, de Michel DENISOT, à Canal Plus. KASSAV signe un contrat avec la maison de disque, Sony.

En pleine période du Disco, la révolution de la musique Zouk, dans une ambiance de collé serré, a redonné, dans les années 80, une nouvelle vie à la musique antillaise. Jusqu’ici et sans création majeure, les orchestres antillais se contentaient d’animer les bals ou de jouer dans les carnavals. Après le mythique Tabou Combo d’Haïti, Kassav’ a suivi les traces de ce dernier tout en forgeant son identité. KASSAV en évitant la World Music, s’inspire du riche folklore antillais, tout le modernisant, à travers le Zouk. «Pour parler du début du groupe, il faut voir le contexte de l’époque avec les mouvements identitaires, explique Jacob DESVARIEUX. «A l’époque, tout le monde se posait des questions, sur ce qu’on faisait là… On savait qu’on était originaires d’Afrique, des descendants d’esclaves, mais quoi d’autre ?» dit Jacob DESVARIEUX. En particulier, le groupe KASSAV s’est revendiqué spécifiquement des valeurs culturelles guadeloupéennes : «Ce groupe, nous l’avons formé en partant d’un constat: les Antilles françaises étaient largement squattées par les musiciens d’Haïti. Il fallait réagir, développer la musique du coin, notamment en intégrant le tambour, car la base de la musique d’ici, c’est le couple tambour–voix. Tout cela pour nous procédait d’une démarche identitaire. C’était important de faire une musique évolutive immédiatement identifiable, même lorsque le tambour n’était pas là physiquement d’ailleurs. C’est à dire que quand un étranger l’écoutait, il devait se dire immédiatement: ça c’est de la musique antillaise» dit Jacob DESVARIEUX.

Crée en 1979 par Georges DECIMUS, le groupe KASSAV, ou galette de manioc mélangée à la noix de coco, un projet culturel, est donc un éveilleur de conscience. La Guadeloupe est entourée d’îles anglophones et hispaniques : «Au départ Kassav’, ce n’est pas seulement un groupe d’amuseurs. On a aussi bien du message identitaire, sociologique, écologique que des histoires d’amour à raconter. Cette variété de thématiques, ce n’est pas pour ratisser large mais parce qu’on parle d’ici tout simplement» dit Jacob DESVARIEUX. En effet, avec Jocelyne BEROARD, il est l’un des musiciens emblématiques du groupe KASSAV, fondé en 1979, inventeur du Zouk, une musique qui avait déferlé jusqu’à Leningrad ; KASSAV, aux Victoires de la musique en 1988 a été élu «Meilleur groupe de l’année». Le Zouk est un mélange de funk, biguine, «Gwo Ka», une musique traditionnelle de la Guadeloupe, et calypso, s’inscrivant ; sans ambiguïté dans la catégorie «musiques populaires».

KASSAV, avec deux disques d’or, s’est produit plus de 60 fois au Zénith, à Paris 19ème, et, contrairement à une légende, c’est le 1er groupe français à avoir rempli le stade de France.

La nouvelle génération préfère le «Raggamuffin» mais Jacob DESVARIEUX estime que le Zouk restera dans l’héritage musical antillais. La longévité de ce groupe a une explication «Il y a eu un très bon casting ! L’idée est venue de Pierre-Édouard Décimus, puis des candidats intéressants, intéressés, ont été auditionnés. On a tenté de s’appuyer sur un concept plutôt que sur de la musique : créer une musique antillaise, appréciée par les Antillais, qui puisse parler au reste du monde. L’idée n’était pas, comme pour la world music, de poser un artiste du Tiers Monde sur de la variété internationale, mais de partir de nos racines» dit Jacob DESVARIEUX.

Jacob DESVARIEUX, marié deux fois, a quatre enfants, dont les aînés sont deux jumeaux.

Paris, le 19 juillet 2021, par Amadou Bal BA – http://baamadou.over-blog.fr/

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