Le débat sur le rétablissement de la peine de mort au Sénégal continue de faire son chemin du fait de la recrudescence de la violence et surtout des meurtres crapuleux dont le dernier en date est la mort atroce du jeune Américain Mouhamed Cissé survenue, hier, des suites d’une agression dans son domicile à Kahone (Kaolack). Ces homicides poussent beaucoup de citoyens sénégalais à prôner le retour de la peine capitale dans le Code pénal. Pourtant, le président Wade, en 2004 avait fait voter une loi sur l’abolition de la peine de mort au Sénégal.
Le Président de la République M. Macky Sall, qui était Premier ministre à l’époque avait cosigné la loi n° 2004-38 du 28 décembre 2004, portant abolition de la peine capitale dont l’exposé des motifs dit clairement : « Le Sénégal est reconnu dans le monde entier comme une terre de paix et de tolérance. Le sens du pardon y est une vertu essentielle. C’est ainsi que la peine de mort, sanction suprême, est abolie de facto depuis plusieurs décennies».
Le retour de la peine de mort permettra-t-il vraiment de réduire la criminalité au Sénégal ?C’est du moins ce que semblent croire certains responsables politiques et certaines organisations dont Jamra et le Forum du Justiciable qui plaident pour le retour de la peine de mort.
Babacar Ba, Forum du Justiciable, un militant de la peine de mort
Babacar Ba du Forum du justiciable est d’avis que la peine de mort, abolit depuis 2004 au Sénégal, doit signer son retour, pour stopper la série de viols suivis de meurtres qui hante la population sénégalaise. Une décision qui semble surprenante, de la part d’un défenseur « attitré » des droits humains.
« On est la seule organisation de la Société civile qui plaide pour le retour de la peine de mort au Sénégal. C’est vrai que certains membres de la Société civile nous ont critiqués. Mais nous pensons que le droit doit être tropicalisé, adapté à notre réalité d’aujourd’hui », avait déclaré Babacar Ba en mai 2019.
Seydina Fall Boughazelli a dit oui
L’ancien député, Seydina Fall alias Boughazelli qui croupit présentement en prison pour trafic de faux billets, avait fait le retour de la peine de mort son cheval de bataille. Il avait même annoncé de faire une proposition de loi dans ce sens à l’Assemblée nationale. Mais, cette proposition n’a jamais suivie d’effet.
Moustapha Cissé Lo, un parlementaire prêt à voter pour la peine de mort
« Je suis pour le retour de la peine de mort. Avec certains députés, nous allons lancer une pétition », avait déclaré Moustapha Cissé Lo.
Abdoulaye Makhtar Diop, l’autre député doublé d’un casque religieux plaide oui
Le Grand Serigne de Dakar, est persuadé que la peine de mort peut dissuasif vis-à-vis des criminels. A l’en croire, c’est la meilleure manière de réprimer de ces crimes récurrents au Sénégal. Ainsi, le vice-président de l’Assemblée nationale milite pour le rétablissement de la peine de mort.
Le « oui, mais » de Mame Makhtar Guèye, Jamra
Après plusieurs moments de réserves, Mame Mactar Guèye de l’ONG Jamra fait finalement parti de ceux qui veulent un retour de la peine de mort au Sénégal. Mieux, il a demandé un référendum sur la peine de mort.
Toutefois, le vice-président de l’ONG Jamra se veut prudent quant à l’application de cette loi, car craint-il, cela peut être une arme pour les hommes politiques pour liquider leurs adversaires.
Levée de boucliers
Dans l’histoire du Sénégal indépendant, la peine de mort n’a été appliquée qu’à deux reprises : une première fois, le 11 avril 1967, sur la personne d’Abdou Ndaffa Faye qui, le 3 février de la même année, avait tué le député Demba Diop ; une deuxième et dernière fois, le 15 juin 1967, sur Moustapha Lô qui, le 22 mars de cette même année, avait tenté d’assassiner le président de la République d’alors, M. Léopold Sédar Senghor.
Ces exécutions avaient créé un tollé. Pas plus loin, l’arrestation de Mbayang Diop, qui aurait tué son employeur en Arabie Saoudite où elle risque d’être décapitée, avait provoqué elle aussi une série de réactions indignées qui ont poussé le ministre des Affaires étrangères saoudien à venir à Dakar rencontrer le Président Sall à cet effet.
Certains ont initié une pétition pour essayer de la sortir des geôles saoudiennes. En 2012, on a frôlé de justesse une crise diplomatique avec la Gambie après l’exécution de Tabara Seydi à Banjul pour meurtre…
La colère noire de Macky Sall vis-à-vis du régime de Jammeh qui avait exécuté un sénégalais en 2012