«David LYNCH (1946-2025) In Memoriam, un cinéaste, réalisateur et producteur de génie, riche de ses films troublants, de sa modernité, de son avant-gardisme, avec une dimension postmoderne, philosophique et psychologique, entre étrangeté et inquiétude honorant Franz KAFKA, LE CORBUSIER et Jacques LACAN» Amadou Bal BA
«Il y a toujours deux côtés dans tout. Les films que je fais, comme la vie, montrent que tout est fait de contrastes : la beauté et la laideur, le bien et le mal, la lumière et l’obscurité», dit David LYNCH, réalisateur américain, né le 20 janvier 1946, à Missoula, dans le Montana, aux États-Unis, et qui nous a quittés le 16 janvier 2025, à l’âge de 78 ans. Grand fumeur, il a été emporté par une maladie des poumons. En 1960, David LYNCH avait alors quatorze ans, son père fut affecté à Alexandria, en Virginie, et la famille déménagea de nouveau. Il avait remporté des nominations aux Oscars pour le meilleur réalisateur pour «The Elephant Man», en 1980, «Blue Velvet», en 1986 et «Mulholland Drive», en 2001. Sa mère, Edwina SUNDHOLM, de souche finlandaise, était citadine et son père, Donald LYNCH, de la campagne. «Tout cela est dans un tel état de tendresse, toute cette chair et ce monde sont tellement imparfaits», écrit-il dans son autobiographie. Aussi, les films de David LYNCH reflètent cette tension, ce royaume d’enfance de complexité où la beauté et les damnés entrent en conflit. «J’appris que, juste en dessous de la surface, il y a un autre monde, et puis encore différent monde lorsque vous creusez plus profondément. Je le savais quand j’étais gamin, mais je ne pouvais pas en trouver la preuve. C’était juste comme un pressentiment. Il y a de la bonté dans le ciel et les fleurs, mais une autre force, une douleur sauvage et décadente, accompagne également le tout», dit David LYNCH. Ses souvenirs d’enfance, un mélange d’obscurité et de lumière, sont, en grande partie, sa source d’inspiration. «De la part de mon frère de dire que j’étais un «meneur né», mais en réalité, j’étais un gamin comme les autres. J’avais de bons copains, mais je ne me sentais pas spécialement populaire, et je n’ai jamais eu l’impression d’être différent», écrit-il dans ses mémoires.
En 1965, David LYNCH, s’intéressant peu à la politique, et en particulier aux questions de tensions raciales de son époque, est allé à Philadelphie suivre des études de Beaux-arts «La politique ne m’intéressait pas. Je crois que je ne votais pas à cette époque. J’ai été accepté aux Beaux-Arts, et j’ai pris le bus pour Philadelphie. C’était mon destin. Jack et moi, on n’assistait pas aux cours – le seul intérêt de cette école, c’était d’être entouré d’artistes comme nous. Tous les étudiants que j’ai rencontrés étaient de vrais peintres. On formait une super bande. À Boston, c’étaient des rigolos en comparaison», écrit-il dans ses mémoires. En effet, les influences sur David LYNCH dépassent largement son cadre familial. «The Art Life», c’est ainsi que définit David LYNCH, qui n’est ni cinéphile, ni sorti des écoles de cinéma. En effet, ses centres s’étendent à différents domaines artistiques auxquels il s’était tout d’abord destiné, comme la peinture, la photographie, les arts plastiques. «Ses films nous invitent ainsi à reconcevoir constamment nos grilles de lecture, puisque le récit, loin d’être la pierre angulaire de l’œuvre, n’est plus qu’une des multiples pièces de créations denses prenant la forme de casse-têtes qui privilégient en outre la collision d’éléments a priori contradictoires. La violence physique et psychologique extrême y côtoie un humour absurde, l’ironie n’est jamais dénuée de sincérité, l’ouverture vers d’autres horizons culturels s’accompagne d’une vision parfois réactionnaire et insidieusement nostalgique de l’Amérique. Lynch est à la fois boy-scout naïf et voyeuriste pervers, rêveur angoissé et éternel optimiste, artiste opaque et homme terre à terre», écrit Bruno DEQUEN. Dans son rapport à la création artistique, les inspirations sont multiples. «L’un des cinéastes les plus éminents d’aujourd’hui, David Lynch, est un réalisateur dont la vision du cinéma est fermement ancrée dans les beaux-arts. Il était motivé pour réaliser son premier film alors qu’il était étudiant parce qu’il voulait un tableau qui « serait vraiment capable de bouger ». Cependant, la plupart des études existantes sur Lynch ne parviennent pas à s’intéresser pleinement aux complexités de la relation de ses films avec d’autres formes d’art. La production cinématographique de Lynch doit être considérée comme inspirée d’un large éventail de références culturelles», écrit en 2010, Allister MACTAGGART. Par ailleurs, David LYNCH affirme que lorsqu’il réalise un film, quatre-vingt-dix pour cent du temps, rien n’est planifié et construit à l’avance. «Il fait appel au subconscient, une forme de résistance au caractère réducteur logique du langage» écrit, en 1997, Martha NOCHIMSON.
Par conséquent, David LYNCH, un avant-gardiste inspiré par LE CORBBUSIER, un spécialiste du film noir, est «un cinéaste de la modernité «Figure clé de l’héritage continu du cinéma moderne, David Lynch conçoit des environnements pour les spectateurs, les transportant dans des mondes intérieurs construits par l’ambiance, la texture et les artifices inquiétants. Nous entrons dans ces intérieurs cinématographiques célèbres pour être enveloppés dans du plastique, substance fondamentale du travail de Lynch», écrit, en 2012, Justuce NIELAND. En effet, dans une dimension surréaliste, David LYNCH a combiné l’intime et les différentes expressions artistiques de son temps, en passant par l’Internet et les nouvelles technologies. Par ailleurs, dans un chaos ordonné, entre simplicité et ésotérisme, il y a un côté mystique et orientaliste dans les inspirations modernistes de David LYNCH. Adepte de la méditation transcendantale, il ne fait rien comme les autres «À partir de Lost Highway, le réalisateur David Lynch a «dévié» dans une nouvelle direction, une direction dans laquelle des images très déroutantes du monde physique occupent une place centrale dans ses films. Cherchant à comprendre cette accentuation inhabituelle dans son travail. Il tire cette vision des Saints Vedas de la religion hindoue, ainsi que de la fascination de son profane pour la physique moderne.» Écrit, en Martha NOCHIMSON, une de ses biographes.
De sa série télévisée classique culte «Twin Peaks» à son film «Inland Empire» en 2006, David LYNCHE est surtout connu pour son style narratif peu orthodoxe ; l’étrangeté et l’inquiétant sont omniprésents. Réalisateur, producteur et scénariste primés, LYNCH déforme et perturbe les intrigues traditionnelles et offre aux téléspectateurs une perspective surréaliste, souvent cauchemardesque. Son approche unique du cinéma a rendu son travail familier aux critiques et au public du monde entier, et David LYNCH crée un nouveau réalité pour les personnages et le public en se concentrant sur l’individu et en embrassant l’existentialisme. William J. DEVLIN et Shai BIDERMAN ont exploré la dimension philosophique au cœur du travail de David LYNCH est un artiste postmoderne ; il a examiné l’obscurité de l’âme humaine, la mauvaise foi et la liberté, l’éthique, la politique et la religion. «Depuis plus de trente-cinq ans, David Lynch est resté l’un des cinéastes les plus étranges, les plus stimulants et les plus provocateurs. Depuis ses premiers films expérimentaux réalisés alors qu’il était étudiant en art à Philadelphie, jusqu’à son incursion dans le cinéma numérique avec « Inland Empire », la filmographie de Lynch est aussi diversifiée qu’influente», écrivent, en 2013, Ligoti Thomas, Blake BUTLER et Kévin SAMPSELL.
Auteur de 10 longs métrages, ceux qui ont vu «Mulholland Drive» ont été à la fois troublés et éblouis, de l’histoire d’un accident de voiture, de nuit, de cette jeune fille débarquant à Hollywood, sur la Mulholland Drive, une route magique et mythique. Grand cinéaste, un artiste sophistiqué de l’étrange, David LYNCH a innové en matière de qualité de l’image, mais aussi à travers cette ambiance effrayante et obsédante dans sa création artistique. Dans ce film, une femme brune amnésique, après un accident de voiture, erre dans les rues de Los Angeles dans un état second avant de se réfugier dans un appartement. Là, elle est découverte par Betty, une blonde saine du Midwest qui est venue dans la Cité des Anges à la recherche de la gloire en tant qu’actrice. Ensemble, les deux tentent de résoudre le mystère de la véritable identité de Rita. Un autre film, «Vertigo» d’Alfred HITCHCOK, sur le thème du sosie, a inspiré une grande partie de l’œuvre de David LYNCH, notamment pour ce qui est de Mulholland Drive.
On se souvient de «Eraserhead», en 1977, une création transcendantale, spiritualiste, tourné de nuit, un premier film de Davdi LYNCH, ou l’histoire de Zombie en noir et en blanc. «Eraserhead», ou littéralement «tête effaceuse». Dans cette vision d’un monde sans émotion ni désir, l’obscurité participe à la création du sentiment de manque et d’absence, David LYNCH est marqué par le spiritualisme «Eraserhead est mon film le plus empreint de spiritualité, mais personne n’y a jamais capté cette dimension. Ce qui s’est produit, c’est que j’éprouvais ces sensations, mais je ne savais pas vraiment ce qu’elles représentaient chez moi. Alors un jour je sors une Bible, je me mets à lire, à lire, j’en arrive à une certaine phrase et je me dis : «C’est exactement ça !»», dit-il dans ses mémoires. En effet, la voisine symbolise la luxure dans le film, luxure qui emmènera d’ailleurs Henry à commettre un vice en ayant des rapports sexuels avec cette dernière, ne pouvant résister à son charme mystérieux, inquiétant et obscur. «Ce qui effraie le plus, ce n’est pas la réalité, mais ce qu’on image qu’elle cache», dit David LYNCH. Le film prend toute sa signification durant le dernier quart d’heure du film. La tête de Henry se détache alors de son corps et s’enfonce dans une flaque de sang, tombe du ciel pour atterrir dans une ruelle où elle s’ouvre. Ce film, inspiré par l’angoisse de David LYNCH de la paternité ; sa fille, Jennifer, née avec des «pieds bots sévères», ce qui a nécessité une intervention chirurgicale corrective importante lorsqu’elle était enfant. Jennifer a déclaré que sa propre conception inattendue et ses malformations congénitales étaient à la base des thèmes du film. Dans ce film, un homme est abandonné par son amie qui lui laisse la charge d’un enfant prématuré, fruit de leur union. Il s’enfonce dans un univers fantasmatique pour fuir cette cruelle réalité. Une ambiance perturbante, un conte hallucinant, mais de génie, un voyage nauséeux dans l’inconscient humain. On est secoué, par l’épouvante, une extraordinaire force plastique et métaphysique. «La méditation transcendantale est une technique simple, facile, sans effort, qui permet à n’importe quel être humain de se plonger en lui-même, de faire l’expérience de niveaux de l’esprit et de l’intellect plus subtils, plus raffinés, et d’entrer dans cet océan de conscience pure, le champ unifié, le Soi», dira David LYNCH. Son film, «Dune» est également l’histoire d’une illumination «C’est pour cette raison que je l’ai réalisé», dit-il.
«Sailor et Lula», en 1990, tourné à Los Angeles et à la Nouvelle-Orléans, un film noir, une romance, est un récit dans lequel deux amoureux fuient la mère de la jeune fille qui s’oppose à leur relation, ainsi que des personnages dangereux et mystérieux qui les menacent. C’est une version Trash de Roméo et Juliette. La passion amoureuse que vivent Sailor et Lula n’est pas du goût de la mère de Lula, Marietta, qui veut faire assassiner Sailor et engage un homme de main. Sailor le tue et se retrouve en prison. Deux ans plus tard, à sa libération, Lula vient l’accueillir. Les amants prennent la fuite. C’est une cavale trépidante et hallucinée d’un mauvais garçon et de sa blonde dulcinée, poursuivis par des tueurs envoyés par la mère de la jeune fille, Johnny Farragut. La cavale de Sailor et Lula a travers le sud des Etats-Unis fera dire à la jeune fille que le monde a vraiment «le cœur sauvage», de noirceur et de cruauté. «Le monde entier est cruel à l’intérieur et cinglé en surface», dit David LYNCH. On est balloté, en apnée car le danger est latent, on sent que, inéluctablement, cette cavale se terminera mal, mais on garde l’espoir, parce que Sailor et Lula forment un couple. «L’année où «Sailor et Lula» a été présenté à Cannes, Fellini défendait La voce della luna. J’étais fier que mon film soit projeté juste après celui de Fellini. C’était pour moi, une consécration», dit-il dans ses mémoires.
«Elephant Man», un film de 1980, relate, pendant l’Angleterre victorienne, cette créature difforme et troublante que ne renierait pas Franz KAFKA. En fait, Joseph Carey MERRICK (1862-1890), alias «Elephant Man», a bien existé ; il est sans doute le monstre humain le plus célèbre de tous les temps. «L’Elephant Man a quelque chose à l’intérieur de lui, qui pousse dans son corps. Il n’était pas un être humain parfaitement accompli mais il avait quand même des qualités très spirituelles. C’était comme si deux choses se passaient en lui, une dans son corps et l’autre qui gardait sa personnalité si innocente et bonne», dit David LYNCH. Extrêmement sensible, doux et assoiffé d’amour, le garçon atteint d’une maladie inconnue, devenu monstrueux au fil des ans, sera rapidement mis au ban de la société : à peine toléré par sa famille, il sera violemment rejeté par le monde entier. Précocement séparé de sa mère, l’amour désertera à jamais son existence. À l’âge de douze ans, anéanti par sa belle-mère et constamment repoussé par son père, il sera contraint de quitter le domicile familial pour tenter sa chance dans une manufacture. S’en suit une période de vagabondage puis l’exhibition en tant que monstre de foire et toute la bêtise humaine. . «David est vraiment une sorte de génie, ça, c’est clair et net. Il comprend le psychisme et les émotions humaines, le cœur humain. Il est aussi assez détraqué, il est capable de projeter son trouble émotionnel et sexuel dans son travail, et de nous assaillir avec les sensations qui l’assaillent», dit Mel BROOKS.
«Lost Highway», est un film que ne renierait pas Franz KAFKA (Voir mon article, sur le centenaire de mort de cet auteur, Médiapart, 17 mai 2024), pour qui le fantastique ou le surnaturel, sont des domaines de possibilité. En effet, c’est un film qui exploite le pouvoir de notre imagination et non une documentation qui mettrait en avant la possibilité de l’existence d’une quatrième dimension, qui rendrait alors la disparition de Fred Madison possible. Il s’agirait en fait d’une œuvre qui explore la façon dont notre vision négative du monde nous empêche de voir les limites infinies de la liberté que nous offre notre univers, lui aussi illimité, comme le pense David LYNCH. Le personnage de Fred Madison ne disparait pas de l’histoire, il se transforme, comme dans «La Métamorphose» de Kafka, en un autre être, ici Pete Dayton, qui lui permet d’avoir une seconde chance dans la vie, et de vivre le monde, d’une autre manière afin de faire les bons choix et de vivre heureux et longtemps. «On n’est pas obligé de comprendre pour aimer. Ce qu’il faut, c’est rêver», dit David LYNCH.
Cinéaste visionnaire et très créatif, la série «Twin Peaks» de David LYNCH nous a hanté à travers ses mystères, avec une sorte de remake, en 2017, «Twin Peaks, The Return». La chaîne de télévision, ABC a été bien inspirée de diffuser cette série policière mâtinée de Soap Opera, construit autour de la mort d’une lycéenne dans le nord-ouest des États-Unis. En effet, dans un capharnaüm érotico-onirique cradingue, David LYNCH filme de façon mimétique le conflit inaltérable de l’ordre et du délire : avec un mélange de précision clinique et d’embrasement baroque. «Et si Twin Peaks représentait un moment-charnière dans l’histoire, non seulement des séries télévisées, mais de la télévision en général ? Et si Twin Peaks marquait le moment où la télévision atteignait enfin sa fin secrète, capitaliste et gnostique, et en l’atteignant, signait sa fin tout court, c’est-à-dire son autodestruction», écrit, en 2010, Pacôme TIELLEMENT.
En 2019, David LYNCH a été honoré pour un Oscar couronnant l’ensemble de son œuvre, et Mulholland Drive, a obtenu à Cannes, le César du meilleur film étranger. «Lost High Way», suivant Slavoj ZIZECK, un de ses biographes, inspiré les prémisses de la psychanalyse lacanienne, est un univers unique du «sublime ridicule» une mise en scène ludique et une traversée simultanée des fantasmes idéologiques fondamentaux qui soutiennent notre société capitaliste tardive. «Le monde contemporain n’est peut-être pas exactement l’endroit le plus brillant où on puisse rêver de vivre. C’est une espèce d’étrange carnaval, où il y a pas mal de douleur, mais qui peut être assez drôle aussi», dit David LYNCH.
David LYNCH a essuyé de nombreux chagrins d’amour et a affronté diverses épreuves, pour finalement réussir sa carrière. «Chaque année, j’avais une nouvelle petite amie, et j’ai commencé très jeune. Elles étaient toutes géniales. (…). Je vais vous raconter le baiser qui est resté gravé dans ma mémoire. Le patron de mon père, M. Packard, est venu nous rendre visite un été avec sa famille. Ils ont séjourné au centre de recherche. Leur superbe fille, prénommée Sue, avait mon âge, et était venue avec son copain. Ils faisaient l’amour ensemble. J’étais tellement loin de la planète sexe que j’ai été totalement abasourdi qu’ils en parlent devant moi. Un jour, Sue et moi avons semé son petit ami pour aller nous balader tous les deux. Dans la forêt de pins jaunes, un épais tapis d’aiguilles, de près de cinquante centimètres, formait une couche d’humus. C’était incroyablement doux. On a couru et on a plongé sur ce tapis moelleux avant de s’embrasser langoureusement. C’était comme dans un rêve. Ce baiser était si intense et profond qu’il a allumé en moi un feu ardent.», écrit-il dans ses mémoires.
C’est sa famille qui a annoncé sa disparition, un brin d’humour dont était doté l’artiste «Il y a un grand vide dans le monde maintenant qu’il n’est plus avec nous. Mais comme il le disait : gardez les yeux sur le donut, pas sur le trou» écrit sa famille, dans un communiqué. David LYNCH a été marié quatre fois. Sa première, de 1967 à 1974, est Peggy LYNCH «Avant Peggy, j’ai eu plusieurs relations de courte durée. Peggy est la première fille dont je suis tombé amoureux. J’aimais Judy Westerman et Nancy Briggs, mais elles ne comprenaient rien à ma peinture et se destinaient à une autre vie. Peggy, elle, appréciait mon travail. C’était ma première supportrice. Comme je ne savais pas taper à la machine, elle dactylographiait tous mes scénarios. Elle était vraiment incroyable. Au début, on était simplement amis. On parlait pendant des heures au drugstore, près de l’Académie. C’était chouette. Un jour, Peggy m’a annoncé qu’elle était enceinte et, au bout du compte, on s’est mariés», écrit-il dans ses mémoires. Leur séparation coïncide avec le tournage de Eraserhead, et David LYNCH trouve un travail de livreur de journaux au Wall Street Journal. «Le matin, j’étais toujours de mauvaise humeur. Par exemple, je voulais mes céréales d’une certaine manière et si cela ne me convenait pas, je m’en prenais à Peggy. Il lui est arrivé de courir au supermarché au petit matin pour m’acheter mes céréales. Je n’étais pas épanoui, Peggy en faisait les frais. Un jour, j’ai montré à Doreen Small un texte que j’avais écrit avant de méditer, et elle s’est mise à pleurer, tant mon récit était sombre. Dès que je me suis mis à la méditation, ma noirceur a disparu .Avant de pratiquer la méditation, j’avais peur de perdre ma ferveur et mon mordant pour le cinéma. En réalité, j’ai compris que cela me rendait plus passionné encore, et plus heureux de faire mon travail. Les gens croient souvent que la colère est une force, alors que c’est une faiblesse qui empoisonne nos relations et nous mine de l’intérieur», écrit-il dans ses mémoires. Sa seconde épouse, de 1977 à 1987, est Mary FISK. Cette période correspond au tournage du film, «Elephant Man» tourné à Londres. Mary FISK avait fait une première fausse couche. Sa troisième épouse de 2006 à 2007, une liaison brève est Mary SWEENEY, en charge du montage de «Blue Velvet». Tout au long de leur relation, «Il peignait sans arrêt. Il avait un four et pendant un temps il a fait de la poterie, il dessinait et construisait des meubles dans son atelier. Il a fait beaucoup de photographies et il a eu plusieurs expositions aux États-Unis et ailleurs. Il ne se lasse jamais, il a beaucoup d’énergie, bien qu’il ne se dépense pas physiquement. Je le harcelais tout le temps pour qu’il fasse un peu d’exercice et qu’il cesse de fumer, mais c’était peine perdue. Sur le tabac, il est comme un ado.» dit Mary SWEENEY. La quatrième et dernière femme, à partir de 2009, est Emily STOFLE, avec des rumeurs d’un divorce, qui n’a pas, finalement eu lieu. David LYNCH a eu trois enfants : Jennifer, née le 7 avril 1968 qui a eu en 1995, un fils, Sid, Austin, né le 7 septembre 1982 et Riley, né le 22 mai 1992.
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Paris, le 16 janvier 2025, par Amadou Bal BA