Présidente de l’Association des blogueurs pour une citoyenneté active, Samira Sabou, très suivie sur Facebook et déjà inquiétée auparavant, a été interpellée le 30 septembre au domicile de sa mère et n’a pas donné signe de vie depuis.
Où est la célèbre journaliste et blogueuse nigérienne Samira Sabou ? Pour quel motif a-t-elle été interpellée samedi 30 septembre ? Par qui ? Face à la presse nigérienne ce jeudi, son avocat, maître Ould Salem Saïd n’a pu dénouer le mystère. Tout au plus reconstitue-t-il les faits de ce 30 septembre. Vers 18 heures, Samira Sabou est chez sa mère avec son époux. Des hommes font irruption et lui intiment de les suivre. L’un d’eux présente un badge de police, elle coopère. Puis disparaît encagoulée. En pareil cas, les charges auraient dû lui être notifiées au poste. Sauf que Me Salem affirme avoir écumé les commissariats et qu’elle est introuvable. «Il ressort de nos discussions avec les responsables de la police judiciaire qu’ils ne sont pas les auteurs de cette interpellation et qu’ils n’ont pas donné d’instruction dans ce sens», dit-il.
Tout indique qu’elle serait détenue à la Direction générale de la documentation et de la sécurité extérieure (DGDSE), les services de renseignement. Ce mercredi 4 octobre, son conseil a déposé plainte contre X pour enlèvement, séquestration et détention arbitraire. «Nous sommes alarmés par la disparition forcée de Samira Sabou et nous demandons au Conseil national pour le salut de la patrie [CNSP, junte militaire au pouvoir depuis le coup d’Etat du 26 juillet, ndlr] de révéler immédiatement où [elle] se trouve», a dénoncé le même jour Amnesty International. «Il est inadmissible qu’une professionnelle de l’information soit ainsi privée de liberté […] Nous demandons instamment sa libération», a réagi de son côté Reporters sans frontières. Les autorités de transition n’ont pas encore fait de commentaires.
«On nous tolère, mais on ne nous reconnaît pas»
La dernière apparition publique de Samira Sabou remonte au 29 septembre. La présidente de l’Association des blogueurs pour une citoyenneté active participe alors à un débat sur la loi portant sur la répression de la cybercriminalité adoptée en 2019. Sujet baroque de prime abord. Après tout, deux mois après le coup d’Etat et le placement sous sanctions du pays par les instances communautaires ouest-africaines (Uemoa et Cédéao), les Nigériens ont d’autres chats à fouetter. Payer les sacs de céréales dont les prix flambent, assurer la rentrée des classes de leurs enfants… Et puis Samira Sabou déroule les verrous de l’information libre censée relayer ces réalités. Fluette et gracieuse, voix claire, verbe incisif, son garçon de 3 ans silencieusement blotti contre son ventre. Elle martèle : «On nous tolère, mais on ne nous reconnaît pas», au sujet des «journalistes numériques» ciblés par cette fameuse loi.