En réaction à la dispersion violente ce matin d’une manifestation pacifique de la société civile dont au moins trois membres sont arrêtés dans la capitale tchadienne N’djamena, Alioune Tine, directeur régional pour l’Afrique occidentale et centrale à Amnesty International a déclaré :
« La dispersion violente de la manifestation pacifique de ce matin, l’arrestation de responsables de la société civile et l’agression contre un journaliste montrent que les autorités tchadiennes ne sont pas prêtes à mettre un terme à la répression et à la censure.
« La restriction de l’accès à Internet tout comme l’ordre donné aux opérateurs de téléphonie mobile d’envoyer des messages informant de l’interdiction d’une manifestation pacifique, constituent une violation flagrante du droit à la liberté d’expression qui implique le droit à rechercher et recevoir les informations par quelque moyen que ce soit.
«Toutes les personnes arrêtées n’auraient jamais dû l’être. Elles n’ont fait qu’exercer leur droit à participer à une manifestation pacifique et non violente et doivent immédiatement être libérées sans conditions.»
Une manifestation pacifique prévue ce matin dans la capitale tchadienne N’Djaména organisée par certaines organisations de la société civile a été empêchée par les forces de sécurité déployées très tôt. Elles ont dispersé les manifestants à coups de gaz lacrymogène et de canons à eau.
Certains manifestants ont été blessés et plusieurs d’entre eux, dont Dingamnayal Nelly Versinis porte-parole du Collectif tchadien contre la vie chère (CTCV) ont été arrêtés. Ce dernier a été arrêté vers 7.30 ce matin et conduit dans une voiture de police, avant d’être relâché environ trois heures plus tard. Cependant les autres manifestants, dont Garba Ahmat Dogo, Abdelbassit Mahamat Ali Acyl et Ahmat Hassaballah de la Convention tchadienne pour la défense des droits humains (CTDDH) sont toujours entre les mains des forces de sécurité.
Selon les informations recueillies par Amnesty International, le procureur de la République les accuse de trouble à l’ordre public et de non-respect d’un ordre d’interdiction.
Le journaliste Djimet Wiche du site d’information Alwihdainfo a été violemment pris à partie par deux policiers qui lui ont donné une gifle et asséné des coups de poing avant de le trainer par terre sur une distance d’environ 100 mètres. Les forces de sécurité finiront par lui présenter leurs excuses après qu’il ait été amené devant leur supérieur hiérarchique, et après avoir montré sa carte professionnelle de journaliste.
La société civile tchadienne avait décidé d’organiser une marche contre le coût élevé de la vie dans le pays et les mesures d’austérité prises par les autorités pour répondre à la crise économique qui sévit depuis fin 2015.
Le 24 janvier, les autorités ont convoqué une réunion avec les organisateurs de la marche pour demander un report le temps de leur permettre d’organiser les forces de sécurité pour l’encadrer.
Elles ont aussi ordonné aux deux opérateurs de téléphonie du pays d’envoyer des messages à leurs abonnés pour les informer de l’interdiction de la manifestation. Après la rencontre avec les autorités, certaines organisations ont décidé de reporter leur participation à la marche pacifique tandis que d’autres dont la CTDDH et le CTCV soutenues par l’organisation ‘Iyina’ et la plateforme regroupant au moins trois grands syndicats (UST, CIST et SYNECS) ont décidé de la maintenir.